Agitprop sur les bonus des traders

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A en croire les médias et le gouvernement, l'enjeu du dernier sommet du G20 était l'imposition de nouvelles règles pour limiter les bonus des traders. Il y aurait beaucoup à dire sur les niveaux de rémunérations des traders et sur l'opportunité ou non d'y apporter des limites. Au demeurant, à une époque ou les nostalgiques de la vieille gauche parlent du "retour de Marx", la rémunération des traders est un exemple cinglant et paradoxal de victoire du travail sur le capital. Mais il ne semble pas contestable que, quelle que puisse être la décision finale sur cette question, elle ne changera en rien l'avenir de l'économie mondial et ne changera pas vraiment le risque que la dernière crise se reproduise. En réalité, les bonus sont plus un symptôme qu'une cause du mal.

Après ce G20, la presse française parle d'avancées et de compromis sur cette question "centrale"... Au passage, lorsque l'on regarde dans le détail, ces "avancées" sont proches d'une tempête dans un verre d'eau. Ce qui est effrayant, c'est que l'on a à peine entendu parler d'un débat de ce G20 beaucoup plus fondamental (et sérieux) qui est celui de la capitalisation des banques. Et pour le coup, les prises de positions ne sont pas celles que l'on aurait pu imaginer.

Un certain nombre de pays menés par le Royaume-Uni et les Etats-Unis sont favorables à un renforcement des exigences de capitalisation pour que les banques soient financièrement plus solides. Ces pays souhaitent obliger les banques à constituer un capital plus solide non seulement quantitativement mais également qualitativement (en imposant des ratios equity/assets plus exigeants). L'Allemagne et la France, si elles ne s'opposent pas au principe d'un renforcement de la capitalisation des banques, entendent limiter cette exigence, craignant notamment que leurs banques aient des difficultés à lever les fonds. En définitive, la position anglo-américaine semble prévaloir.

Ce débat sur la capitalisation des banques est loin d'être simple mais il est fondamental car il porte sur la gestion des risques. En effet, un des principaux problèmes de notre système financier a été celui de la gestion des risques. Les obligations de capitalisations sont une des clés permettant de limiter les prises de risques excessives (avec le risque de trop limiter ce qui aurait pour conséquence d'asphyxier l'économie). Mais je ne suis pas persuadé que ce type de mesures soient suffisantes.

La titrisation est un formidable instrument de répartition de risques complexes mais la gestion de tels risques est un métier que les banquiers ne semblent pas toujours maîtriser. Les banquiers pourraient tirer des leçons de l'expériences des assureurs qui ont, en leur temps, connu un certains nombres de crises qu'ils ont finalement résolues (sans le soutien de l'argent public faut-il le rappeler). Certes, le monde de l'assurance a été touché et de manière retentissante avec la faillite d'AIG, mais les assureurs n'intervenaient qu'en bout de chaîne, à un stade où ils pouvaient légitimement s'attendre à ce que la maîtrise des risques ait été analysée par les banquiers. Tout n'est pas merveilleux sur le marché de l'assurance, mais certains banquiers seraient bien inspirés d'aller y apprendre des choses avant de souscrire n'importe quels risques.

Enfin, pendant ce temps, notre président cherche à redorer son image en tapant sur les traders et leurs bonus ce qui est plus payant (sans mauvais jeu de mots) pour 2012.


Publié dans Economie

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