Loi contre le voile: une atteinte au principe de laïcité

Publié le par David Méheut

Depuis le 11 septembre 2001, une peur latente de l'islamisme gagne nos sociétés. Cette crainte affecte le regard qu'elle porte sur les communautés françaises de confession musulmane. Evidemment il ne s'agit pas de racisme... du moins le croient ceux qui n'ont de cesse de voir ces différences comme une menace. La peur de l'autre est de retour!

Il est certes évident que l'islamisme radical ne concerne pas seulement l'Afghanistan ou les pays du Golfe, que certains Imams prêchent la destruction de l'Occident, que les terroristes qui ont touché nos villes étaient plutôt intégrés dans nos sociétés... Cet islamisme radical, il faut bien entendu le combattre. Mais le rejet global de toute forme de "communautarisme" qui s'exprime si souvent n'en est pas moins injustifiable et contre-productif.

Les communautés sont pointées du doigt comme des entités "associales". Attention, pas les communautés bretonnes, corses ou auvergnates qui sont vues comme sympathiques. Non, celles qui sont pointées du doigt sont plutôt les communautés de français d'origine immigrée.

Les communautés, ce n'est pas nécessairement le repli fermé sur soi. C'est aussi et avant tout le premier réseau de solidarité, d'entraide et d'amitié. Il est vrai que les critiques très jacobines du communautarisme préfèreraient sûrement un modèle où des français -de préférence athés- se fondraient dans un moule nationale et qui se réfèrerait toujours et uniquement à l'Etat providence pour leurs besoins sociaux... (d'accord, je caricature un peu, mais quand même...)

Symptome affligeant de cette réaction française, la loi contre le voile adoptée récemment.

Cette loi, prétendue application du principe de laïcité, visant hypocritement tous les signes religieux, est en réalité une des pires atteintes portées à la laïcité et à la liberté de conscience religieuse.

Rappelons-le, la laïcité, c'est la neutralité de l'Etat quant aux positions religieuses (athée, catholique, protestante, musulmane, juive, etc.). Autrement dit, l'Etat ne favorise ni ne porte atteinte aux religions, il se comporte de manière neutre à leur égard. Ainsi, il est compatible avec le principe de laïcité d'exiger des fonctionnaires qu'ils n'affichent pas leurs préférences religieuses. En interdisant le voile, la loi prend le parti d'un athéisme aggressif. Ce faisant, on prive des citoyens de leur liberté de vivre en conformité avec leur foi. On aura du mal à justifier sérieusement que le port du voile représente un danger ou une menace pour les tiers.

L'objection suivante tient au fait que certaines des jeunes filles portant le voile sont contraintes de le faire par leur famille ou leur entourage. Si ce phénomène existe, cette objection ne tient pas la route et ce pour plusieurs raisons. Au passage, on note bien en employant de telles justifications qu'on s'éloigne de la prétendue loi sur les signes religieux en général mais que l'objectif visé est bien le voile.

Dire qu'on va libérer les jeunes filles contraintes de porter le voile en leur imposant de l'enlever est chimérique. Le problème dont on parle alors, c'est bien l'autoritarisme familial et pas le symptome qu'est le voile. Non seulement on ne règle rien mais en plus, on porte atteinte aux droits de celles qui le portent librement par conviction religieuse.

Quant à l'argument qui consiste à dire que l'on réussi à faire plier les pères autoritaires il paraît bien de courte vue et sert seulement à satisfaire une volonté de défoulement sur un personnage peu sympathique (ce père autoritaire) plutôt qu'à régler quoi que ce soit.

Au final, le résultat de cette loi liberticide consiste à braquer davantage une partie de la population et d'encourager ainsi un communautarisme replié dont nous ne voulons pas.

Revenons-en plutôt à la solution équilibrée du Conseil d'Etat qui consistait à seulement exiger le retrait du voile quand il portait atteinte au bon déroulement des cours (éducation physique, expériences de chimie, etc.).

Publié dans Droit et Justice

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