Pédagogie de la réforme

Publié le par David Méheut

Ci-après, un article remarquable sur www.fgoulard.fr :

Nos administrations ont beaucoup de mal à évoluer. Pourquoi ? tout simplement parce qu'elles n'y sont pas contraintes. Changer est toujours problématique. Ceux qui ne sont pas obligés de le faire y répugnent. Nos entreprises, soumises aux règles du marché, le font en permanence ; c'est une question de survie. Mais le secteur public échappe à cette exigence. Le pouvoir politique, dont le secteur public dépend, devrait avoir en permanence ce souci d'adaptation, pour sans cesse améliorer son efficacité et mieux répondre à des besoins toujours en évolution. Mais les  inconvénients du changement, qui sont immédiats, l'emportent généralement sur les avantages, qui sont hypothétiques et lointains.

 

Si on ajoute que les responsables politiques sont souvent mal préparés à exercer les fonctions qu'ils occupent, qu'ils sont accaparés par l'actualité et donc peu mobilisés par les enjeux de long terme, qu'ils ne restent pas suffisamment longtemps à leur poste, pour la plupart d'entre eux, pour inscrire une action dans le long terme, on comprend pourquoi les réformes les plus nécessaires prennent du retard dans notre pays.

On peut s'y résigner. On peut considérer avec fatalisme, que les Français, vieux peuple indocile, acceptent moins que les autres les remises en cause. On peut estimer que nous vivons ainsi et après tout pas si mal. Je pense pour ma part que la résignation est la pire des attitudes. Nous payons cher notre conservatisme. Notre niveau de dépenses publiques est le plus élevé d'Europe, alors que nos services publics, notre système de protection sociale ne sont pas meilleurs que ceux de nos voisins européens. C'est la cause première de notre retard de croissance, si préjudiciable à l'emploi et au pouvoir d'achat.

Il y a une nécessité impérieuse de réformer, de rechercher en permanence, pour un objectif politique donné, les solutions les moins coûteuses et les plus efficaces comme on le fait constamment en économie privée. Mais la condition première, sans laquelle rien n'est possible, c'est l'acceptation des réformes par les Français.

Le dossier des retraites l'illustre bien. En 1995, les Français n'avaient pas conscience de l'urgente nécessité d'une réforme. L'incidence de l'évolution démographique sur l'équilibre financier des régimes de retraite n'était pas clairement perçue. Et lorsque le gouvernement d'Alain Juppé a engagé la refonte des régimes spéciaux, déjà indispensable, beaucoup de nos compatriotes se sont sentis menacés. Aujourd'hui, la pédagogie a fait sont oeuvre. Même si les syndicats de la SNCF réagissent, l'opinion ne les suit pas.

Les réformes se préparent, s'expliquent, se discutent, se mettent en oeuvre dans la durée. Il est illusoire de penser qu'en quelques mois, bénéficiant de l'état de grâce consécutif à une élection, on peut imposer un programme complet de réformes, à supposer qu'elles soient au point.

Or aujourd'hui, après un premier train de mesures adoptées durant l'été, nous sommes dans l'attente : quelle sera, durant cinq ans la politique fiscale ? A l'évidence, les trois dispositions votées en juillet ne constituent pas une politique achevée. Quel avenir pour notre assurance-maladie ? personne ne pense que les franchises médicales, solution illusoire qui n'a jamais donné de résultats, suffisent à garantir la pérennité du système. Quelle réforme de l'Etat et des collectivités territoriales ? l'annonce de la fusion de deux direction du ministère des finances est un peu courte, face à l'ampleur de la tâche. Quid de l'Ecole, de l'Université, dont la réforme n'est qu'à moitié faite ?

Bref, il est urgent que le gouvernement définisse ses lignes directrices pour les prochaines années, sans quoi, faute d'une pédagogie suffisante, aucune réforme ne pourra aboutir.

F.Goulard

Publié dans Actualité

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